Pas de Souveraineté sans Solidarité

Il n’y aura pas de souveraineté sans solidarité.

La force d’un pays se mesure tant à ses attributs de souveraineté (lois, justice, monnaie, exécutif) qu’à la cohésion dont il fait preuve en cas de crise, pour maintenir son unité et éviter son effondrement. Il ne saurait y avoir de souveraineté sans solidarité.

Or, la souveraineté européenne régulièrement promue par le Président Macron est une illusion dangereuse, qui nous mènera à la guerre et au désastre.

Il est loin le temps de la CECA où l’objectif ouvertement affiché était de rendre la guerre techniquement impossible par l’imbrication des économies européennes. Ce qui pouvait marcher à 6 ne marche plus à 27. Aux côtés des membres historiques, européistes par conviction, se sont greffés de nouveaux Etats membres, souvent plus pauvres, et européistes par intérêt.

La crise du Covid a montré l’absence criante de solidarité européenne, et le retour de réflexes protectionnistes de survie. Les quelques malades accueillis dans les hôpitaux français, luxembourgeois ou allemands ne peuvent cacher les centaines de milliers de masques chirurgicaux déroutés ou retenus de force par les douanes nationales des différents Etats. L’Union européenne, sans solidarité intérieure, ne saurait se prévaloir d’une quelconque souveraineté.

Macron joue un jeu dangereux. Pour sauver son illusion européiste, et faute de cohésion, il cherche à désigner un ennemi commun à l’UE pour tenter de souder les Etats membres. Un peu comme un couple en crise qui espère sauver son avenir en faisant un enfant. Le procédé est connu, et le résultat est souvent dramatique. Cette fuite en avant inconsidérée risque de mener droit vers une crise géopolitique et un désastre historique. L’Union Européenne sans solidarité interne s’apparente aux coalitions européennes du 18ème siècle. Impressionnantes sur le papier, mais très dissemblables en réalité et dissoutes dès les premières défaites encaissées. Macron devrait réfléchir au sort des adversaires de Napoléon.

Les derniers signaux ne sont guère rassurants. Faute de cohésion interne et de diplomatie unitaire, ce qu’elle n’aura jamais, l’Union européenne est en délicatesse avec les grandes puissances mondiales. Sous pression américaine, elle n’en finit plus de courir après un accord commercial avec une Grande-Bretagne qui n’en voit manifestement pas l’intérêt. Au demeurant, elle suscite la méfiance de la Chine et de la Russie par les actions hostiles et éparses des chancelleries nationales. L’Union européenne est un nain politique, une grenouille qui voudrait se faire aussi grosse que le bœuf aux hormones américain, l’ours russe ou le dragon chinois. Le risque de conflit armé (économique, cybernétique, spatial, voire bactériologique) est redevenu réel. Le nationalisme européiste, c’est la guerre. A ce jeu-là, la France n’a strictement aucun intérêt à rester sur un tel rafiot technocratique devenu un boulet géopolitique.

Forte de ses capacités militaires, politiques et économiques, la France a pourtant de nombreux atouts non utilisés. Elle a probablement intérêt à reconstruire une force de défense indépendante, en étroite coopération avec la Grande-Bretagne. Elle pourrait également initier le leadership d’une union douanière et économique plus avantageuse avec ses voisines latines et méditerranéennes, de l’Espagne à la Grèce, du Maroc à la Tunisie, et laisser l’Europe centrale à l’Allemagne, qui y est déjà omniprésente. Sur le plan diplomatique enfin, il est urgent de refonder l’amitié avec la Russie. L’alliance franco-russe nous a toujours été favorable dans le passé, et la Russie a souvent été francophile.

Cela n’empêchera pas les coopérations culturelles et l’entente entre les peuples. Cela permettra surtout à la France de survivre dans un monde de plus en plus incertain.

Il y a urgence. Entre l’aventure européiste et leur destin national, les Français doivent comprendre, et choisir.

Georges LAFON (Fonctionnaire) article publié le 8 juillet 2020 sur le site frontpopulaire.fr