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PETIT TRAITE DE LA DECROISSANCE

Petit Traité de la décroissance sereine

Par Serge Latouche , objecteur de croissance, professeur émérite d’économie à l’Université d’Orsay

Aux éditions mille et Une Nuits

 

Extraits :

Nous, les gavés de la surconsommation, nous vivons dans une société phagocytée par une économie qui n’a d’autre finalité que la croissance pour la croissance. Dire qu’une croissance infinie est incompatible avec un monde fini et que nos productions autant que nos consommations ne peuvent dépasser les capacités de régénération de la biosphère sont des évidences. Il nous faut proposer une alternative au délire de la société de croissance.  

C’est-à-dire une société d’»a-croissance » dans laquelle on vivra mieux en travaillant mieux et en consommant moins, soit un projet d’une société autonome et économe recouvert par le slogan de décroissance.

Les 3 ressorts de la société de croissance (la publicité qui crée le désir de consommer, le crédit qui en donne les moyens, l’obsolescence programmée qui en renouvelle la nécessité) sont de véritables «pousse-au-crime». Des montagnes d’ordinateurs, de téléviseurs, de réfrigérateurs encombrent  poubelles et décharges avec des risques de pollution divers. L’humanité consomme déjà près de 30% de plus que la capacité de régénération de la biosphère. Notre dette écologique correspond à 34 ans de productivité biologique de la planète entière. Et ceci à cause de la logique de démesure de notre système économique. La délocalisation des productions est commandée par les actionnaires et l’approvisionnement hors région par les centrales d’achat de la grande distribution. Les crevettes danoises vont se faire décortiquer au Maroc puis reviennent au Danemark avant de repartir vers leurs lieux de commercialisation !!!

Une société de non-croissance est un préalable à tout programme d’action politique respectant les exigences écologiques actuelles pour des sociétés conviviales, autonomes et économes. Le cercle vertueux de la décroissance sereine est de remplacer l’attitude du prédateur par celle du jardinier, c’est-à-dire Produire localement pour l’essentiel les produits servant à la satisfaction des besoins de la population dans des entreprises locales financées par l’épargne collectée localement. Les mouvements de marchandises et de capitaux doivent au contraire être limités à l’indispensable dans l’optique d’une société de décroissance sereine. La société de décroissance ou plus exactement de non-croissance, implique un solide protectionnisme contre les concurrences sauvages et déloyales. La société de décroissance n’est pas un retour au carcan communautaire mais à un retissage organique du local avec des écoles villageoises, des entreprises familiales, des épiciers du coin et des cinémas de quartier. C’est un changement radical de Cap mais qui se heurte au pouvoir réel de l’oligarchie ploutocratique dominant le monde et dont les lobbies sont l’expression la plus visible.

Notre conception de la société de la décroissance n’est ni un impossible retour en arrière ni un accommodement avec le capitalisme. C’est un dépassement de la modernité. Le mouvement de la décroissance est révolutionnaire et anticapitaliste. Il se situe résolument contre la mondialisation et le libéralisme économique.

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